Responsable du Centre de génétique / Centre de référence maladies rares
« Anomalies du développement et syndromes malformatifs » à l’Hôpital d'Enfants de Dijon, le Professeur Laurence Olivier-Faivre est également responsable de la filière AnDDI-Rares sur le plan national, qui regroupe 3 000 maladies rares sur 7 000 recensées. Elle partage sa vision sur les avancées et les progrès restant à accomplir pour que chaque patient soit mieux diagnostiqué, traité et accompagné.
Quels défis posent les maladies rares aujourd’hui ?
Pr. Laurence Olivier-Faivre. - Une maladie est dite rare lorsqu’elle affecte moins d’une personne sur 2 000 (moins de 30 000 personnes en France). Si chacune touche très peu de patients, elles concernent collectivement plus de 3 millions de personnes en France. Leur rareté, leur complexité et la diversité des signes cliniques entraîne souvent une errance diagnostique de plusieurs années. Ce sont le plus souvent des maladies orphelines, c’est-à-dire sans traitement. Les principaux défis sont donc le diagnostic, la recherche sur les traitements et l’accompagnement des patients et de leurs proches pour une meilleure qualité de vie.
Pourquoi parler d’excellence française dans le cadre des maladies rares ?
Pr. LOF. - En 2005, la France a été le premier pays en Europe à lancer un plan maladies rares, sous l’impulsion des associations de patients, et à mettre en place une organisation novatrice. Celle-ci repose maintenant sur 387 Centres de référence multisites (CRMR) qui jouent un rôle d’expertise pour une maladie ou un groupe de maladies, et 1 800 Centres de compétences (CCMR) répartis sur tout le territoire qui assurent la prise en charge et le suivi de proximité des malades. En 2015, un deuxième plan a créé 23 filières de santé maladies rares, regroupant tous les acteurs de soin autour d’une maladie rare ou d’un groupe de maladies rares : professionnels de santé, laboratoires de diagnostic, unités de recherche, associations de patients, structures éducatives, sociales et médico-sociales, partenaires publics ou privés... A titre d'exemple, citons la filière Brain-Team pour les maladies rares du système nerveux central, Cardiogen pour les maladies cardiaques héréditaires, FAI2R pour les maladies auto-immunes et auto-inflammatoires rares, FILFOIE pour les maladies rares du foie).
Cette organisation française a servi de modèle à l’Europe. Créés en 2017, les réseaux européens de référence ont en effet repris l'organisation des filières de soins françaises et beaucoup d’entre eux sont coordonnés par la France.
Comment s’organisent concrètement le diagnostic et la prise en charge en France ?
Pr. LOF. - Lorsqu’un patient touché par une maladie rare est identifié, il est orienté le plus souvent vers l'hôpital le plus proche de chez lui. Celui-ci cherchera à établir un diagnostic et à assurer la prise en charge et le suivi par un ou plusieurs spécialistes, selon les organes touchés par la maladie. En cas de besoin, il pourra demander avis au CCMR ou au Centre de référence (CRMR) dont il dépend, évitant ainsi au patient de se déplacer. Situés dans les Centres Hospitaliers Universitaires (CHU) et soutenus par un financement public, ces centres de référence regroupent des équipes pluridisciplinaires et animent un réseau de soins. Ils coordonnent les travaux de recherche et sont les interlocuteurs privilégiés des associations de patients.
Quelles sont les ambitions du 3e Plan National Maladies Rares (PNMR) ?
Pr. LOF. - Couvrant la période 2018-2022, le 3e PNMR renforce les actions des plans précédents ; son ambition est de « Partager l’innovation, un diagnostic et un traitement pour chacun ». L’objectif est que chaque malade soit diagnostiqué au plus tard un an après la première consultation d’un spécialiste, dans la limite des connaissances scientifiques actuelles. L’accent est mis sur la formation des professionnels, l’information et l’éducation thérapeutique des patients (y compris en Outre-mer) et la pérennisation des financements nationaux.
L'axe épidémiologique de ce plan reste fort avec la poursuite du soutien de la Banque Nationale de Données Maladies Rares (BNDMR). Son objectif est de constituer une collection homogène de données à partir des informations médicales anonymes de tous les patients atteints de maladies rares et ce, afin d’améliorer leur prise en charge.
Pouvez-vous citer un exemple d’avancée importante sur les maladies rares ?
Pr. LOF. - En synergie avec le plan France Médecine Génomique 2020-2025, des plateformes de diagnostic moléculaire sont mises en place pour séquencer en haut débit l’ensemble des gènes du génome, afin d’élucider les bases génétiques et moléculaires des maladies rares et espérer ainsi accélérer leur diagnostic. La filière AnDDI-Rares est particulièrement concernée : il y a quelques années, plus de la moitié des patients étaient sans diagnostic, en particulier ceux qui souffraient de pathologies avec déficiences intellectuelles. Établir un diagnostic précis permet de connaître la cause de la maladie et les risques de récidive dans une famille, orienter la prise en charge, connaître le pronostic, accéder plus facilement à des aides (comme la prise en charge du handicap).
Pour ce qui est des traitements, 50% des nouvelles thérapies géniques s’appliquent aux maladies rares. Pour 95% des maladies rares, il n’existe pas encore de traitement curatif.

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Les maladies rares en quelques chiffres
- Plus de 25 millions de malades en Europe, 350 millions dans le monde
- 80% des maladies rares ont une origine génétique
- 3 200 gènes responsables identifiés à ce jour
- Plus de 5 ans de délai pour poser un diagnostic pour 25% des personnes touchées
Les expertises et ressources disponibles :
- 23 filières nationales de santé maladies rares (FSMR), en miroir des 24 réseaux européens de référence
- 109 centres de référence multisites formés de 387 centres de référence (CRMR) et de plus de 1 800 centres de compétence (CCMR)
- 220 associations de patients
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